La crevette-pistolet à pattes épineuses appartient à la famille des Alpheidae, des crustacés qui sont répartis un peu partout sur le globe. Ils sont aussi appelés « décapodes », car ils possèdent 10 pattes. Ils se cachent souvent dans des cavités rocheuses ou sous des pierres en général en eaux peu profondes. C’est un animal plutôt sédentaire, c’est-à-dire qu’il ne va pas s’éloigner beaucoup de son foyer. Ils sont en général territoriaux et sortent pendant la nuit pour se nourrir durant de très courtes périodes.
L’espèce Alpheus dentipes se retrouve plus précisément en Europe en Méditerranée, sur les côtes Nord-Est de l’Atlantique et jusqu’aux îles d’Atlantique centrale (Madère, Canaries, etc.) et elle mesure entre 3 et 5 cm dans sa forme adulte.
Les crevettes de cette famille se reconnaissent généralement grâce à leurs pinces asymétriques, dont l’une peut parfois être aussi grande que le corps. Chez les genres Alpheus et Synalpheus de cette famille (auquel Alpheus dentipes appartient) la plus grande pince est très puissante et adaptée pour produire un son extrêmement fort, comme un claquement, lorsqu’elle se referme. Cette pince peut être à droite ou à gauche et si elle est amputée, l’autre pince grandit pour la remplacer et une petite se régénère à la place de celle qui n’est plus là. Pour se déplacer, ils marchent au fond de l’eau, leur grosse pince les handicapant grandement pour la nage.
Les crevettes-pistolet utilisent cette grande pince à la fois comme moyen de défense, pour le déplacement d’objets bouchant leur repaire, mais aussi pour la chasse. En effet, non seulement ce claquement produit un son à environ 220 décibels, qui est presque aussi fort que les cliquetis des cachalots, les plus gros prédateurs sur Terre (230 dB) et bien plus puissant que le décollage d’une fusée à 207 dB (sachant que la limite de tolérance de douleur chez l’humain est à environ 120-130 dB). Mais cette pince fait également augmenter la température pendant un bref instant et à un endroit localisé, jusqu’à 4700° Celsius, soit un peu moins que la température à la surface du Soleil. Mais ce n’est pas tout : cette pince se referme à une vitesse de 20m/seconde, soit 72km/heure et projette l’eau contenue à ce moment-là à l’intérieur de la pince à environ 30m/seconde en se refermant. C’est ainsi qu’elle se nourrit, tuant ou étourdissant ses proies en moins d’1 seconde, d’où son surnom de « crevette-pistolet ».
Vous vous demandez peut-être comment elle fait pour survivre à son propre claquement : il s’avère que sa tête est recouverte d’une couche protectrice l’empêchant de s’assommer elle-même.
Ce sont les militaires qui se sont intéressés en premier à cette crevette, car les sons qu’elle produit lorsqu’elle se trouve en colonies sont tellement forts qu’ils perturbent les sonars des sous-marins dans l’eau. Elles peuvent aussi interférer avec les protections anti-sous-marins.
Voici une vidéo montrant et expliquant l’effet impressionnant de cette pince :
Sources :
- Guide des homards, crabes, langoustes, crevettes et autres crustacés décapodes d’Europe, Lucia Falciai, 1996. Lausanne : Delachaux et Niestlé.
- https://doris.ffessm.fr/Especes/Alpheus-dentipes-Crevette-pistolet-a-pattes-epineuses-3892
- https://arstechnica.com/science/2022/07/pistol-shrimp-sport-tiny-helmets-to-protect-selves-from-their-own-shock-waves/